Papillomavirus et cancer du col de l’utérus

Maël ROOJEE, Biologiste Médical chez Eurofins.

Les papillomavirus humain, abrégés par l’acronyme HPV (human papillomavirus) sont la cause la plus fréquente d’infection sexuellement transmissible dans le monde. Si la plupart des infections sont asymptomatiques, certains types de virus HPV dits à haut risque (HPV-HR) peuvent causer des lésions à même d’évoluer en cancer du col de l’utérus (CCU), et ce chez une femme sur 5.

Une infection à un virus HPV-HR peut évoluer vers un cancer du col de l’utérus. La mortalité attribuée à ce cancer est de l’ordre de 270 000 femmes par an dans le monde. On observe 3000 nouveaux cas et 1000 décès par an en France.

Les hommes peuvent également développer d’autres cancers notamment ORL et génitaux, en lien avec une infection à HPV.

Le virus HPV est très résistant dans le milieu extérieur, c’est pourquoi même nettoyé, des contaminations croisées peuvent avoir lieu notamment avec des objets (sextoys, ect).

Il existe au moins 120 génotypes (ou mutations) différents du virus, et les formes les plus fréquemment mises en causes dans le cancer du col de l’utérus (CCU) en Europe, sont les types 16 et 18.

L’installation d’une infection persistante à HPV à haut risque (HPV-HR) précède le cancer. C’est le point de départ le plus fréquent du processus oncogène. L'intégration du génome viral des HPV, dans le génome cellulaire hôte a été décrite comme un événement clé dans la cancérogenèse du CCU.

Symptômes du papillomavirus

Les manifestations cliniques dépendent du type d’HPV (liste non exhaustive) :

  • Verrues cutanées : Elles affectent environ un quart des enfants d’âge scolaire. Il s’agit d’une infection cutanée bénigne et peu contagieuse liée à la présence d’un papillomavirus à la surface de la peau. Dans la grande majorité des cas, les verrues disparaissent spontanément dans les 2 ans.
  • Verrues génitales :  Le plus souvent bénignes, elles peuvent être associée à des dysplasies pouvant dégénérées en cancer --> Génotypes HPV6 et HPV11.
  • Cancer du col de l’utérus --> Seules les infections à HPV-HR (haut risque) sont susceptibles d’évoluer vers un CCU : génotypes16, 18, 31, 33, 35, 39, 45, 51, 52, 56, 58, 59, 68 et le génotype 66 considéré pHR (possiblement à haut risque).
  • Autres cancers (plus rares): dont cancer anal et cancer de l’oropharynx.  
  • Papillomatose laryngée : c’est une lésion tumorale bénigne, relativement rare, qui ne devient qu’exceptionnellement dyspnéïsante après une longue période de dysphonie, justifiant la nécessité d’examiner les cordes vocales de tout enfant présentant une dysphonie traînante --> Génotypes HPV6 et HPV11.

Diagnostic biologique et dépistage du papillomavirus

  • Cytologique pour rechercher des cellules anormales possiblement pré-cancéreuses ou cancéreuses : Seul le frottis cervico-utérin (FCU prélèvement au niveau du col) est autorisé.
  • Virologique (pour rechercher une infection à HPV-HR) : On recherche par PCR l’ADN des HPV-HR ou les ARN messager qui codent pour les oncoprotéines E6 et E7 : Autoprélèvement ou FCU.
Pour réaliser un dépistage du papillomavirus, vous pouvez vous rendre chez votre professionnel de santé pour effectuer votre prélèvement.

Il est également possible de réaliser votre auto-prélèvement à domicile.

Pour cela, vous pouvez :

  • Récupérer le matériel en laboratoire, réaliser le prélèvement sur place (ou à domicile) en salle de soin, et le déposer le plus rapidement possible au laboratoire
  • Demander un kit en pharmacie, réaliser le prélèvement chez vous, et le déposer en laboratoire
  • Commander un kit par la poste, réaliser le prélèvement chez vous, puis le renvoyer par la poste

Trois précautions sont à retenir avant votre rendez-vous :

  • Le frottis doit être fait en dehors de la période des règles, reportez donc votre rendez-vous si besoin ou anticipez votre cycle lors de la prise de rendez-vous.
  • Évitez les rapports sexuels 24 à 48 heures avant le rendez-vous.
  • Reportez le rendez-vous si vous prenez un traitement local par voie vaginale qui risquerait de fausser le résultat.

Les recommandations de fréquence de dépistage sont les suivantes :

Femme de 25 à 30 ans : tous les 3 ans après 2 examens consécutifs normaux à 1 an d’intervalle, un examen cytologique sera réalisé. En cas d’anomalies détectées, un test HPV-HR par PCR sera réalisé sur le même prélèvement.

Femmes de 30 à 65 ans: détection par un test HPV-HR par PCR 3 ans après le dernier frottis normal, puis tous les 5 ans en cas d’absence d’HPV-HR. En cas de présence d’HPV-HR, une cytologie sera réalisée avec la nécessité de réaliser un FCU en cas d’auto-prélèvement.

Le test HPV-HR correspond à un test de dépistage et permet la détection des HPV-HR.
Un test HPV-HR positif n’est pas synonyme de cancer du col de l'utérus, vous devrez cependant effectuer un frottis classique chez un professionnel de santé.

Pour éliminer l’éventualité d’une évolution possible vers un CCU, si le test à l’HPV est positif, on réalisera un examen cytologique réflexe (ou frottis) ; cela correspond à une analyse au microscope des cellules du col de l’utérus sur un FCU. La dénomination « ASC-US+ » signifie « atypical squamous cells of undetermined significance », et témoigne de la présence de cellules squameuses anormales.

Si on observe des cellules anormales sur le prélèvement, la patiente sera rappelée pour réaliser une colposcopie ; une sonde sera introduite dans le conduit vaginal afin d’observer directement le col de l’utérus avec une « loupe ». En cas de doute, s’ensuivra une biopsie du tissu suspect. Ce test final permettra d’infirmer ou de confirmer un diagnostic de cancer du col de l’utérus. Détecter à temps, ce dernier peut être pris en charge et sauver des vies.

 

Prévention

En prévention, il est possible de faire vacciner vos enfants afin qu’ils ne se contaminent pas au virus, et ne développent pas de cancer. Pour cela, il est recommandé de les vacciner entre 11 et 14 ans (avant le premier rapport sexuel).

Une méta-analyse récente des programmes de vaccination des filles à l’étranger a montré une réduction de 51 % [42 %-58 %] des lésions précancéreuses du col de l’utérus chez les filles âgées de 15 à 19 ans et une réduction de 31% [16%-43%] chez les femmes âgées de20 à 24 ans.

Selon des chercheurs Australiens, près de 80% de la population australienne est vaccinée contre l’HPV, et le virus serai en voie de disparition. Les auteurs de l’article espèrent ne plus être sujets au cancer du col de l’utérus d’ici 2034.

Questions fréquentes :

Non. Le portage viral de l’HPV est le plus souvent transitoire, ce qui signifie qu’il ne reste dans le corps qu’entre 6 et 25 mois ; avec une régression des lésions dans 80% des cas. Ainsi, la présence d’un HPV-HR à un moment donné ne signifie pas nécessairement une évolution vers un cancer du col de l’utérus. En effet, on observe un pic de portage viral dans la population de 25 ans avec presque 50% de portage, mais ce taux diminue à partir de 30 ans.

Si on présente un HPV à un moment donné, il sera nécessaire de suivre son statut ; si le portage dure plus de 25 mois, un suivi plus poussé sera mis en place.

OUI. La vaccination chez les jeunes garçons est désormais recommandée car elle participe à l’éradication du virus dans toute la population ; un garçon vacciné ne transmettra pas le virus à sa partenaire.

Pour un HSH (homme ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes), l’âge limite de vaccination passe de 19 à 25 ans car cette population est à risque.

OUI. La vaccination protège uniquement contre les types d’HPV-HR les plus fréquents. De plus, tous les HPV-HR peuvent rester à l’état latent et peuvent infecter ou réinfecter en cas de baisse des défenses immunitaires. Dans tous les cas, « mieux vaut prévenir que guérir ».

OUI.

  • Si vous avez reçu le courrier d’invitation du Centre Régional de Coordination des Dépistages des Cancers et que vous avez transmis vos étiquettes d’invitation au dépistage au préleveur, vous serez remboursée à 100%, sans avance de frais.
  • Si vous participez spontanément au dépistage, vous serez remboursé sur la base sécurité sociale.
  • Si vous bénéficiez de la Complémentaire santé solidaire (C2S), la prise en charge de la consultation et du test se fera à 100 % sans avance de frais et sans dépassement d’honoraires.

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